Sylvie Malgrange
Home, sweet home!... Les défis émotionnels de la crise
Home, sweet home... En ce moment, notre "Home", la maison, c’est à la fois notre lieu de travail, notre lieu de vie familiale, notre seul point d’attache pour les jours de la semaine comme pour le week-end, loin de nos proches, de nos amis, et de nos activités habituelles. On sait bien que chaque situation est une opportunité d’apprendre et de grandir. Bien sûr! Oui mais… Ce n'est pas facile de s’en rendre compte sur le moment, quand on est confronté à des challenges dans notre quotidien et quand on est submergé par des émotions désagréables ou douloureuses ! La crise sanitaire actuelle, en nous soumettant à des situations inédites et à des pressions particulières, génère pour tous des défis multiples, que ce soit sur le plan personnel, relationnel, professionnel, ou économique. Chacun est touché par cette crise, de plus ou moins près, mais nous sommes tous concernés pas les défis qu’elle soulève, pour le monde et pour nous-mêmes. Cette situation particulière nous offre des opportunités d’apprentissage sur nous-mêmes et sur les autres, à condition de dépasser les difficultés du moment…
APPRENDRE A VIVRE AVEC NOS EMOTIONS DIFFICILES
Dans ce contexte particulier, bien évidemment, des émotions « difficiles » peuvent venir perturber notre quotidien chamboulé, et chacun peut se trouver confronté à des sentiments de peur, de colère, de frustration, de tristesse…
* La peur, ou les peurs, sur différents plans, peur pour soi-même et pour la santé de nos proches, inquiétudes sur le plan économique, stress devant les incertitudes professionnelles et financières, angoisse devant trop d’informations pas toujours justes et pas toujours fiables
* La frustration ou la colère de devoir rester « enfermé », de devoir partager son espace sans pouvoir sortir librement, on peut se sentir privé de liberté, ce dont on n’a pas l’habitude, la frustration aussi liée au sentiment d’impuissance, le stress de ne pas pouvoir faire autant de sport que d’habitude ou d’activité physique pour évacuer ses tensions
* Le stress de devoir s’organiser pour travailler dans son espace de vie personnel, qui est en principe l’endroit où l’on se ressource entre deux journées de travail, et de devoir souvent, dans le même temps, garder un focus sur son activité professionnelle, superviser «l’école à la maison », gérer les tensions inéluctables dans cette cohabitation forcée et permanente des membres de la famille… Entrent aussi en jeu le souci de devoir définir de nouvelles règles pour que l’espace de chacun soit respecté, et de nouveaux modes d’organisation afin que les contraintes de tous soient prises en compte
* La tristesse d’être séparé de ses proches, de ses parents, de ses amis, le désarroi de ceux qui savent leurs proches confrontés à la maladie et ne sont pas autorisés à aller les soutenir de près…
SURMONTER SES PEURS ET SON STRESS
Toutes ces émotions, et notre façon de les vivre, peuvent nous apprendre beaucoup sur nous-mêmes. La peur et le stress peuvent, selon notre perception, simplement nous freiner, ou nous paralyser complètement, et nous risquons alors d'adopter une attitude de repli devant le "danger", ou de réagir par un comportement d'attaque. Le simple fait de prendre conscience de nos peurs et de notre stress nous aide à les accepter et à en comprendre l’origine, leurs effets particuliers sur nous et sur nos comportements, et ainsi à retrouver un peu de sérénité. Une fois qu’on les reconnaît, on peut surmonter et dépasser ses peurs…
* Garder dans son quotidien un rythme de journée classique avec des repères et des rituels. Accepter d’avoir parfois l’impression de s’éparpiller ou de ne pas avancer assez vite, de travailler peut-être moins efficacement, et compte-tenu du contexte, il est encore plus important de se fixer des objectifs en plusieurs étapes, plus accessibles, et de célébrer les accomplissements en prenant conscience chaque jour ou chaque semaine de ce qui a été effectivement réalisé…
* Etre attentif aux pensées qui déclenchent les peurs et qui, en provoquant la sécrétion de cortisol dans le corps, favorisent l’apparition du stress. Cela signifie accepter la situation car nous ne pouvons pas la contrôler. Ne pas s’inquiéter pour ce que nous ne pouvons pas contrôler, mais utiliser plutôt son énergie en choisissant des pensées positives et rassurantes, qui vont nous aider à nous sentir plus sereins…
* Développer des attitudes positives telles que la bienveillance, la solidarité, la gentillesse, la connection aux autres avec les moyens à notre disposition actuellement, le dialogue pour développer ou retrouver l’harmonie familiale, l’écoute et l’ouverture aux autres, accessibles même de chez-soi… Reconnaître que les autres vivent la situation à leur façon et avec leurs propres émotions et leurs ressentis personnels permet de développer son empathie et sa compréhension du monde… Cultiver l’optimisme pour un futur positif et résilient, et, en attendant que ce futur arrive, se satisfaire de plaisirs simples et disponibles facilement, en restant en conscience dans le moment présent…
UTILISER CE TEMPS PARTICULIER POUR SOI ET POUR LES AUTRES…
Et puis cette crise et ce confinement forcé nous donnent du temps, plus que d'habitude, pour nous recentrer sur l'essentiel, et l'opportunité de redéfinir nos priorités et de nous recentrer sur l'essentiel...
* Revoir sa définition du temps et sa disponibilité pour passer des moments en famille, parfois source de tensions, mais qui permettent aussi de redéfinir nos relations avec nos proches, avec nos enfants parfois déjà grands et que l’on redécouvre à l’occasion de ces quelques semaines passées ensemble. Redécouvrir et apprécier les moments partagés et être aussi là, à distance, pour nos proches dont on est séparé physiquement pour l’instant.
* S’accorder du temps pour une introspection et pour mieux se connaître, se reconnecter à ce qui est vraiment important pour nous, à ce que l’on veut maintenir et à ce que l’on va choisir de changer dans nos vies par la suite, notamment sur le plan professionnel. L’incertitude permet aussi de changer de perspective, de réfléchir à ce que l’on veut vraiment, en lien avec ses valeurs et sa mission de vie, de redessiner ce qu’on a vraiment envie de faire, de se poser les bonnes questions sur ce que l’on veut réaliser dans un futur plus ou moins proche… Tout devient possible…
* Prendre du temps pour les autres, en se demandant comment on veut contribuer, ce que l’on veut apporter au monde… Développer son empathie en imaginant la situation des personnes qui subissent personnellement et profondément, en raison de cette crise, des effets sur leur propre santé, sur leur situation financière ou professionnelle. Trouver de la joie en devenant moins individualiste et plus solidaire, en prenant en compte l’intérêt collectif car cette crise nous apprend, avec les mesures qu’elle entraine, à nous mettre en retrait pour mieux protéger les autres.
